Pourquoi est-il urgent de végétaliser la ville ?
Aujourd’hui, devant l’urgence climatique et le besoin de la population de respirer un air plus pur, les initiatives sont nombreuses pour végétaliser la ville. En quoi le végétal est-il un élément essentiel au bien-être en ville ? Et comment les communes et leurs partenaires parviennent-ils à gagner ce pari d’une aire urbaine remplie de nature ?
Le végétal contre les îlots de chaleur
Les canicules de plus en plus nombreuses rendent urgente la mise en place de solutions pour redonner de l’ombre à la ville.
Paris pourrait enregistrer une hausse de 4 degrés d’ici la fin du siècle. Dans le monde, 3 humains sur 4 pourraient faire face à des canicules à risque en 2100.
Les îlots de chaleur urbains (ICU), un enjeu des métropoles
Les dernières canicules, parmi les plus difficiles que la France ait connues depuis 2003, ont rendu les villes irrespirables pendant des jours. De plus, la chaleur s’installe pendant des durées de plus en plus longues et baisse à peine la nuit en zone urbaine. La raison à ce phénomène : le grand nombre de surfaces et des bâtiments qui composent la ville, cette dernière étant soumise à une inertie thermique qui se réfléchit d’un pan de mur à un autre. À cela s’ajoutent l’activité humaine intense, les transports ou, de plus en plus et par un effet contre-productif : la climatisation.
L’ensemble de ces éléments entraîne un phénomène d’îlots de chaleur qui augmente encore plus la température. Les effets sur les habitants et les visiteurs sont directs : inconfort, impossibilité de sortir pendant la journée, insomnie durant la nuit, voire des conséquences graves sur la santé. La répétition annoncée de ces épisodes de canicule représente bien sûr un enjeu essentiel des prochaines années pour le bien-être de la population.
Le végétal pour faire respirer la ville
Parmi les solutions qui permettent de faire baisser la température, le végétal a la part belle. Aux abords des parcs, la réduction est optimisée par les végétaux qui rejettent dans l’air de l’humidité par le phénomène naturel d’évapotranspiration.
Cela repose aussi bien sûr sur une réduction de l’émission des gaz à effet de serre et de nouvelles infrastructures moins gourmandes en énergie, auxquelles peuvent participer les végétaux, notamment sur les toits. Directement sous les arbres, que ce soit dans un parc ou en longeant une coulée verte, les végétaux créent de l’ombre. Si bien que la température baisse, sur place, de 2 degrés environ.
Mais le végétal n’est pas seulement un pare-soleil. Il a aussi la faculté de limiter l’écoulement des eaux. Car, en zone urbaine, les revêtements de sol entraînent une imperméabilisation et donc l’écoulement des eaux de pluie, qui se chargent au passage de composés polluants. L’écoulement peut aussi être à l’origine d’inondations. En végétalisant la ville, la rétention temporaire de l’eau, l’équilibre, et le cycle naturel du transport de l’humidité, peuvent être relancés.
Le végétal, un élément essentiel au bien-être
Vivre à proximité d’un espace vert réduit la prévalence de nombreuses maladies : -23% d’asthme, -31% de troubles d’anxiété, -25% de dépressions. C’est aussi une attente forte pour 8 français sur 10 qui souhaitent emménager à proximité d’un espace vert.
Le végétal en ville est à l’origine de très nombreux bienfaits, souvent par un effet domino. Outre son importance dans la lutte contre le dérèglement climatique et l’amélioration du cycle de l’eau, il concourt aussi à limiter la pollution de l’air. Certes, les composés polluants peuvent aussi être mauvais pour les végétaux, mais ils ont la capacité d’absorber les polluants, dont ils se servent pour se développer. Cela, en transformant le CO2 en composés carbonés organiques.
C’est aussi dans cet objectif que Strasbourg a lancé un plan « Strasbourg, ça pousse ». Cette initiative de l’Eurométropole permet à tout citoyen strasbourgeois de proposer un projet végétal : jardins familiaux, partagés, potagers urbains, pieds d’arbres, etc. La collectivité finance les projets, la direction de la mobilité et des espaces publics et naturels réalisent les travaux. Les graines « pieds d’arbres » et « pieds de murs » sont quant à elles offertes, de même que du lierre. C’est ensuite au porteur de projet d’entretenir son installation. La ville encourage d’ailleurs à se réunir en collectif d’habitants pour éviter qu’une personne, ne pouvant plus s’occuper de son espace vert, le délaisse.
À Milan, les « forêts verticales » – qui sont en fait deux tours d’habitation – comprennent pas moins de 20 000 plantes. Mises au point par l’architecte italien Stefano Boeri, les immeubles ont été élus les plus beaux du monde. Et ce ne sont pas les oiseaux qui diront le contraire : les nidifications y sont très nombreuses. À Aubervilliers, la tour Emblématik, conçue par l’Atelier Castro Denissof Associés, propose 88 logements et des jardins suspendus, ouverts sur les parties communes. Chaque propriétaire bénéficie par ailleurs de 80 m2 d’espace vert.
À Paris, les projets portés par la ville, ses partenaires et des associations, sont nombreux. C’est ainsi qu’en mai 2019, la mairie a annoncé qu’un poumon vert s’inviterait à l’horizon 2024 – autrement dit d’ici les Jeux Olympiques – entre le Trocadéro et la Tour Eiffel. Sur 1,6 km, parcs, coulées vertes, promenades, se succéderont pour offrir aux piétons un véritable coin de verdure en ville sur une zone emblématique de la Capitale.
D’une manière générale, en offrant un meilleur cadre de vie, les espaces verts en ville sont aussi des espaces de socialisation. Qu’il s’agisse de se promener et de discuter avec les autres passants, ou de partager un jardin, la nature fait du bien à l’ensemble de la collectivité. La verdure, les parcs arborés, favorisent aussi l’activité physique. Autant de bénéfices qui favorisent la réduction du stress des citadins.
Quels engagements possibles pour les acteurs du secteur de l’immobilier ?
Les opérateurs immobiliers peuvent favoriser la présence de végétal dans leurs réalisations en maximisant les espaces de pleine terre, en végétalisant les toitures, en associant les habitants à la conception des espaces végétalisés ou encore en assurant une gestion durable de ces espaces, à l’instar de la gestion zéro phyto appliquée par les collectivités. Certains se fixent ainsi des objectifs chiffrés en termes de végétalisation, s’obligeant à intégrer des espaces végétalisés dans leurs opérations tertiaires ou résidentielles, et proposant parfois des services associés à ces espaces partagés (agriculture urbaine, jardins collectifs, terrasses arborées communes, parcs arborés…)
À côté du succès des plantes vertes à l’intérieur des appartements et des maisons, la végétalisation de l’aire urbaine s’inscrit comme une suite logique. Telle une réponse évidente aux défis climatiques, le végétal sait aussi se conjuguer au présent et au futur avec les innovations architecturales. Il trouve ainsi sa place partout, au bénéfice de toute la population et des visiteurs.