Une méthode pour mesurer l’impact carbone d’un quartier
Le bilan carbone prévisionnel, élaboré en amont des travaux, est un atout dans la prise de décision. Zoom sur une approche qui va amener les urbanistes et opérateurs à penser la ville bas carbone à une nouvelle échelle.
À RETENIR
- La méthode « Quartier Énergie Carbone » permet d’évaluer de manière prédictive l’empreinte carbone d’un quartier avant même la construction, en se basant sur l’analyse du cycle de vie des projets urbains.
- Le logiciel UrbanPrint, développé avec Efficacity et le CSTB, fournit des estimations précises des émissions carbone, influençant ainsi les décisions d’aménagement, de choix de matériaux et d’emplacement.
- Cette approche incite à la mutualisation des infrastructures à l’échelle du quartier, optimisant la performance collective par rapport à des projets traités isolément.
- Le label BBCA Quartier valorise les projets bas carbone exemplaires, avec différents niveaux de performance, soutenu par des outils comme UrbanPrint pour encourager des pratiques durables.
Délimiter les contours de la chaîne de valeur, repérer ses principales sources d’émission de gaz à effet de serre et favoriser l’émergence de leviers pour la limiter. Voilà, si l’on devait la résumer en quelques lignes, les objectifs de la feuille de route ministérielle de décarbonation de l’aménagement urbain qui s’adresse à la fois aux pouvoirs publics et aux professionnels de la filière chargée de transformer le foncier, les usages et le cadre de vie des Français. « Pour réussir cette transition immense, la formation de tous (professionnels, élus, etc.) est indispensable (…). Les décisions liées à la réduction des émissions carbone dans la filière de l’aménagement sont éminemment publiques. Elles sont difficiles, compte tenu des changements de comportement qu’elles engendrent. Mais elles sont nécessaires », expose ainsi Anne Fraisse, directrice générale d’Urbain des Bois et co-présidente de la feuille de route, en préambule dudit document publié en deux-mille-vingt-trois. L’une des directives préconise notamment que les projets d’aménagement soient soumis à une évaluation prédictive des émissions de CO2. C’est la raison pour laquelle désormais, les équipes de Nexity apprécient le poids carbone d’un projet avant même la pose de la première pierre.
Nexity Villes et Projets fait mieux que suivre cette simple recommandation (qui reste de l’ordre du facultatif), puisqu’elle est devenue aménageur-ambassadeur de ce modus operandi éthique, en optant pour la méthode Quartier Énergie Carbone, promue par l’ADEME. En janvier deux-mille-vingt-trois, une première convention est signée avec Efficacity pour évaluer le bilan carbone d’un des chantiers phares dont Nexity Transformation des territoires est aménageur : le projet de la presqu’île d’Hérouville Saint-Clair, dans le Calvados. « Le but était d’effectuer un premier bilan carbone de cette opération et d’identifier les leviers d’optimisation pour réduire l’empreinte du projet, dans l’optique d’obtenir le label Quartier BBCA », se souvient Barbara Descottes, directrice de l’ingénierie chez Nexity Villes et Projets, qui a initié ce rapprochement avec l’institut de R&D spécialiste de la décarbonation urbaine. Après cette première expérience, un partenariat pluriannuel a été signé en mars deux-mille-vingt-quatre entre Nexity Villes et Projets et Efficacity, qui apporte son soutien technique et surtout son logiciel phare, codéveloppé avec le CSTB. Baptisé « UrbanPrint », l’outil en question délivre une estimation précise du coût carbone d’une opération d’aménagement urbain dès sa phase de conception, selon les données qu’on lui fournit. « De ce fait, le bilan carbone prévisionnel devient aussi un facteur de prise de décision, au même titre que l’aménagement en général, les matérialités, les usages et bien sûr les coûts », note Barbara Descottes. Morgane Colombert, directrice des études et des partenariats chez Efficacity, confirme : « Cette information offre une visibilité plus claire et sert in fine de base aux porteurs de projet pour qu’ils opèrent des arbitrages, sur des choix de composants, d’emplacement, de matériaux isolants. » Elle se félicite également de voir un groupe leader tel que Nexity se placer à l’avant-garde d’une approche qui n’est pas encore une contrainte réglementaire : « Il y a un vrai enjeu d’acculturation des acteurs de l’aménagement à la réflexion sur la performance carbone prédictive. »
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Instinctif et accessible, UrbanPrint amène également davantage de transparence. « C’est un outil que les maîtres d’ouvrage peuvent s’approprier, alors qu’autrefois, le bilan carbone était l’apanage des bureaux d’études techniques, chacun ayant développé sa propre méthode de calcul », explique Barbara Descottes. Enfin, autre avantage, et non des moindres : si elle venait à se généraliser, l’estimation préliminaire de l’empreinte carbone pourrait occasionner un changement de paradigme. « Là où il était de coutume d’évoquer la performance carbone de bâtiments, cette méthode permet d’aborder la question à l’échelle d’un quartier », pointe justement Morgane Colombert. Planifier la performance carbone selon cet ordre de grandeur amène les porteurs de projet à élaborer des infrastructures partagées plus efficaces et à booster la synergie entre les bâtiments qui composent le quartier. Cela peut inclure l’installation de réseaux de chauffage et de refroidissement collectifs, la conception d’espaces verts qui contribuent à la séquestration du carbone, mais aussi à la gestion des eaux pluviales, à la mise en place de systèmes de gestion des déchets plus efficaces, tels que la collecte sélective et le compostage communautaire. « Un quartier bas carbone pensé comme tel aura de toute façon toujours plus d’impact positif que la somme de la performance d’îlots pris individuellement, même s’ils ont été chacun bâtis de manière vertueuse, grâce à la mutualisation que l’échelle de quartier rend possible », souligne Barbara Descottes. Il n’y a pas que l’empreinte carbone qui s’en retrouve diminuée : l’investissement consenti également. En adoptant cette approche plus large, les développeurs et les autorités pourront quant à eux bénéficier d’économies d’échelle dans la mise en œuvre de technologies et de pratiques de construction durables.
Le label BBCA Quartier, qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit d’une certification développée par l’association BBCA, visant à encourager la création de quartiers bas carbone exemplaires. Structuré autour de cinq piliers (Espace public, Construction, Énergie, Aménagement, Empreinte habitant), il comprend quatre phases de labellisation et propose trois niveaux de performance (Standard, Performance, Excellence). Ce label est ouvert à toute candidature et est soutenu par le logiciel UrbanPrint.
La méthode Quartier Énergie Carbone, qu’est-ce que c’est ?
Cette méthode, conçue pour être utilisée lors des phases préliminaires de conception, vise à évaluer de manière quantitative et prédictive la performance carbone et énergétique d’un quartier ou d’un projet d’aménagement, en suivant les principes de l’analyse de cycle de vie (ACV). Cette approche est adaptée tant aux quartiers entièrement nouveaux qu’à ceux intégrant un tissu urbain existant.