dessalement de l'eau de mer : vue d'une plage paradisiaque de la Côte-d'azur
Publié le 22.04.25 - Temps de lecture : 3 minutes

Dessalement de l’eau de mer : solution d’avenir ou impasse écologique ?

Loading the Elevenlabs Text to Speech AudioNative Player…

Face aux sécheresses à répétition, le dessalement de l’eau de mer gagne du terrain un peu partout dans le monde. En France, cette technologie intrigue autant qu’elle interroge : solution miracle ou impasse énergétique ?

À RETENIR

  • Le dessalement de l’eau de mer, bien qu’essentiel dans certaines régions (Israël, Espagne), reste marginal en France où les ressources naturelles sont encore suffisantes.
  • La technique dominante, l’osmose inverse, est très énergivore (2 à 3 kWh/m³), soit dix fois plus que le traitement d’eaux souterraines classiques.
  • Les rejets salins issus du processus présentent un risque écologique significatif pour les écosystèmes marins proches des zones de rejet.
  • Considéré comme un recours d’urgence, le dessalement ne doit pas être généralisé : la priorité doit aller à la réduction de la consommation et à la réutilisation des eaux usées.

Alors que dans plusieurs pays du pourtour méditerranéen le dessalement est déjà bien installé, cette technique reste marginale en France. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Selon l’Association internationale du dessalement (IDA), près de 21 000 usines de dessalement étaient en activité dans le monde en 2023, permettant de produire environ 120 millions de mètres cubes d’eau potable par jour, soit l’équivalent de la consommation quotidienne de plus de 500 millions de personnes. Ces installations se concentrent principalement au Moyen-Orient, en Espagne, au Mexique, en Australie ou encore au Chili. En France, à l’inverse, la technologie reste peu utilisée. Une poignée d’unités fonctionnent en Corse, ou encore dans certains territoires d’Outre-mer. Sur le continent, seuls quelques projets pilotes voient le jour. « En France, on dispose de suffisamment de ressources naturelles pour le moment. Ce n’est donc pas une priorité », explique Benoit Teychené, enseignant-chercheur à l’Institut de chimie des milieux et matériaux de l’université de Poitiers (IC2MP, équipe E-Bicom). Mais à mesure que les pressions sur la ressource s’intensifient, notamment dans le Sud-Est, le regard sur cette technologie évolue.

Dessalement de l’eau de mer : comment ça marche, et pourquoi c’est si énergivore ?

Le dessalement de l’eau de mer repose sur une idée simple : séparer le sel de l’eau pour rendre cette dernière potable. Trois techniques coexistent, mais une seule est réellement utilisée à grande échelle aujourd’hui : l’osmose inverse. Ce procédé fait passer l’eau sous haute pression à travers une membrane semi-perméable, qui retient les sels et autres particules. L’osmose inverse a largement remplacé la distillation thermique, plus ancienne et énergétiquement encore plus coûteuse. En moyenne, il faut 2 à 3 kilowattheures (kWh) pour produire un mètre cube d’eau dessalée. « C’est environ dix fois plus que pour le traitement d’une eau souterraine classique », précise Benoît Teychene. Autre difficulté : les rejets de concentrats. L’eau rejetée après traitement est deux fois plus salée que l’eau de mer d’origine. Ces rejets sont souvent déversés en mer, à distance des côtes et en profondeur. Mais leur impact sur les écosystèmes marins est réel, en particulier sur la faune et la flore locales, sensibles à de telles concentrations en sel.


À lire aussi


Une technologie utile… en ultime recours

Dans certaines régions du monde, le dessalement est devenu indispensable. En Israël, près de 80 % de l’eau potable provient désormais de l’eau de mer. En Espagne, la Méditerranée alimente en partie les réseaux des zones touristiques. Mais ces exemples ne sont pas transposables tels quels en France. Pour Benoît Teychene, le dessalement de l’eau de mer ne doit pas être perçu comme une solution à généraliser. « C’est un peu la technique de facilité. On a besoin d’eau, on sait la produire. Mais ça coûte cher en énergie, et il y a des impacts environnementaux derrière. » Cette technologie de dessalement peut avoir son utilité, mais dans des situations bien précises, et en aucun cas pour des usages agricoles ou industriels de grande ampleur. « Faire du dessalement pour aller arroser des cultures, n’est pas la solution », juge-t-il. La piste jugée la plus cohérente reste celle de la réutilisation des eaux usées traitées, déjà expérimentée dans plusieurs régions. Couplée à une réduction des consommations dans les usages domestiques, agricoles et industriels, cette stratégie permettrait selon lui de sécuriser l’approvisionnement en eau potable, tout en limitant les impacts environnementaux. En clair : le dessalement peut dépanner, mais il ne résout rien à long terme. « Pour moi, la meilleure solution, c’est d’être cohérent. Moins consommer, mieux utiliser, et recycler au maximum ce que l’on a » conclu-t-il.

Envies de ville : des solutions pour nos territoires

Envies de ville, plateforme de solutions pour nos territoires, propose aux collectivités et à tous les acteurs de la ville des réponses concrètes et inspirantes, à la fois durables, responsables et à l’écoute de l’ensemble des citoyens. Chaque semaine, Envies de ville donne la parole à des experts, rencontre des élus et décideurs du territoire autour des enjeux clés liés à l’aménagement et à l’avenir de la ville, afin d’offrir des solutions à tous ceux qui “font” l’espace urbain : décideurs politiques, urbanistes, étudiant, citoyens…

✉️ Je m’inscris à la newsletter