Comment les villes se mobilisent-elles pour réduire les déchets de leurs habitants ?
51% des ordures ménagères produites chaque année sont stockées, enfouies ou incinérées, avec des conséquences néfastes pour l’environnement. Or, les ¾ de ces déchets sont mal triés et n’ont rien à faire dans nos sacs poubelles. À la fin de la chaîne, ce sont seulement 49% de nos déchets qui sont recyclés ou réutilisés. 568 kilos, c’est la quantité de déchets que produit par année chaque Français, selon les chiffres de l’ADEME. C’est deux fois plus qu’il y a 40 ans ! Alors que le projet de loi antigaspillage a été récemment adopté à l’Assemblée nationale, les communes s’organisent pour aider leurs administrés à limiter la taille de leurs poubelles. Quels sont les leviers dont les municipalités disposent pour favoriser les bonnes pratiques ? Nous faisons le point sur ces dispositifs, pas toujours efficaces.
Les ordures ménagères, qu’est-ce que c’est ?
Ce sont tout simplement les déchets produits par les particuliers au cours de leurs activités quotidiennes. Reste de repas, nourriture périmée, produits d’hygiène… Un habitant produit en moyenne 568 kilos de déchets par an, qui se retrouvent dans les poubelles, les conteneurs de tri et en déchèterie.
Un défi qui n’a cessé de croître
Si depuis 2013, le volume des déchets que nous produisons annuellement tend à baisser (-0,3% en 10 ans), il est toujours bien trop élevé au regard de nos engagements. Mais nos poubelles représentent surtout un défi majeur pour les collectivités locales. En tant que responsables de la collecte, de nombreuses municipalités ont vu leurs frais de ramassage et de traitement grimper en flèche. Elles s’organisent afin d’inciter leurs administrés à mieux gérer leurs déchets.
Adoptée en 2015, la loi de transition énergétique pour la croissance verte a en effet fixé un objectif : réduire de 10% les déchets ménagers en 2020 par rapport à 2010.
Parce qu’une poubelle bien triée, c’est d’abord un citoyen bien informé, la loi oblige les mairies à mettre à leur disposition un guide présentant les différents modes de collecte, les règles d’utilisation des bacs ainsi que les jours et les heures de ramassage. Et ce n’est pas la seule obligation que la ville est tenue de respecter.
Les collectivités locales doivent prévoir au moins une récolte de déchets toutes les deux semaines, voir toutes les semaines dans les ensembles de plus de 2.000 habitants. Mais au vu du volume d’ordures à traiter, elles sont parfois contraintes d’organiser des ramassages quotidiens. Avec les nuisances que la gestion opérationnelle engendre : pollution sonore, embouteillages, encombrement des trottoirs, mauvaises odeurs…
Le meilleur déchet, c’est celui qu’on ne crée pas
Aux grands maux, les grands remèdes. Pour encourager les habitants à sortir du modèle « fabriquer, consommer, jeter », certaines mairies s’organisent pour bannir les produits à usage unique. L’été dernier, la ville de Paris a ainsi offert 50.000 gourdes pour lutter contre les bouteilles en plastique jetables et encourager les Parisiens à utiliser les fontaines à eau de la capitale. A Soual (Tarn) et Mende (Lozère), des gourdes sont régulièrement distribuées aux séniors et aux enfants des écoles maternelles.
À Lorient, la ville fait la guerre aux couches jetables. Les parents qui font l’acquisition de modèles lavables peuvent recevoir jusqu’à 120 euros par enfant. En un an, ce dispositif permettrait d’éviter 350 kilos de déchets par bébé.
Recycleries, ressourceries… La région Ile-de-France a décidé d’accompagner l’ouverture de lieux dédiés au réemploi et à la réutilisation. Objectif, faire évoluer les pratiques consuméristes et favoriser une gestion durable des ressources. Ces temples de la récupération – actuellement au nombre de 36 – contribuent à réduire les déchets et permettent aux consommateurs de faire des bonnes affaires. Un pari 100% gagnant qui aurait permis de détourner 3.000 tonnes de déchets de l’enfouissement rien qu’à Paris.
À Nantes, un coup de pouce financier est proposé aux habitants qui souhaitent faire l’acquisition d’un composteur, preuve que même en ville, il est possible de traiter ses déchets organiques. Des composteurs collectifs peuvent être installés en pied d’immeuble. A Neuilly, ils sont mis à disposition gratuitement, à condition d’en faire la demande. Malgré tout, ces dispositifs ne sont pas toujours suffisants.
L’incitation punitive
Contraintes de traiter des montagnes de déchets, certaines collectivités n’essayent plus de sensibiliser mais veulent désormais obliger leurs habitants à moins jeter. Comment ? En limitant tout simplement le nombre de jours de ramassages. Les administrés ne peuvent sortir leur poubelle que certains jours fixés à l’avance, sous peine d’être sanctionnés. Le principal problème de cette méthode réside dans le fait que les usagers indélicats auraient tendance à se débarrasser de leurs poubelles n’importe où.
Lorsque la méthode douce n’est pas efficace, certaines mairies n’hésitent plus à frapper directement au portefeuille. A Montargis par exemple, les frais de ramassage des poubelles ont été multipliés par trois depuis 2017, date de la mise en place de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères incitatives (REOMi). Selon un rapport de l’ADEME, la facturation du ramassage en fonction de la quantité a fait ses preuves : elle permettrait de réduire la masse des déchets de moitié. Entre la carotte et le bâton, les Français semblent avoir fait leur choix.