Affluence estivale : comment mieux gérer le stationnement en ville ?
Melun, Strasbourg, Menton, Evreux… À l’heure d’été, de nombreuses municipalités étendent le stationnement gratuit en voirie pour soutenir leur activité économique et tenter de limiter les bouchons dans les zones balnéaires. Gratuité du stationnement, limitation de la durée, multiplication ou réduction des places disponibles… Comment repenser un stationnement en ville qui évite les bouchons et incite les automobilistes à laisser leur voiture au garage ?
Saviez-vous que les voitures n’ont pas toujours eu droit de cité dans l’espace public et que jusqu’en 1928, elles avaient même l’interdiction de se garer dans les rues ? Près d’un siècle plus tard, la voiture s’est durablement installée en ville. A Paris, plus de la moitié de l’espace public est occupé soit par la circulation, soit par le stationnement automobile. Les voitures étant immobiles 95% du temps, elles ont besoin de place pour se garer. Dans la capitale, plus de 8 km2 sont réservés au stationnement, soit l’équivalent du XVe arrondissement. Une aberration si l’on tient compte du fait que le taux d’occupation des véhicules qui circulent est compris entre 1,1 et 1,2. D’autant plus que d’après les calculs de l’Ademe, une voiture roule en moyenne à 14 km/h en ville contre 15 km/h pour les vélos.
Rapides, économiques mais surtout écologiques, les mobilités douces sont amenées à se développer dans les grandes villes. Il est donc nécessaire de libérer de l’espace sur la voie publique pour rééquilibrer son usage et faire de la place aux modes de transport alternatifs.
Réduire ou augmenter les places de stationnement, une fausse bonne idée ?
Pour diminuer l’emprise de la voiture dans les rues, de nombreuses agglomérations ont adopté une politique de réduction du nombre des places de parking en voirie. L’objectif est simple : il s’agit de décourager les automobilistes qui souhaitent se rendre dans les centres-villes de le faire en voiture pour alléger le trafic en ville. Le problème étant qu’en réduisant le nombre de places de stationnement, on ne réduit pas mécaniquement le nombre de voitures qui circulent dans les rues.
Dans les faits, le risque est même d’aggraver une problématique que les titulaires du permis connaissent bien : la recherche d’une place. En ville, on estime généralement qu’une voiture sur quatre cherche à se garer. Or, ce temps de recherche s’accompagne de nombreuses nuisances. Il constitue, d’une part, une perte de temps significative pour les conducteur qui subissent cette activité improductive. Selon une étude Harris Interactive pour Ector, un automobiliste passerait ainsi une journée par an à chercher une place ! Mais le fait de ne pas trouver d’espace de stationnement induit également des externalités négatives liées à la circulation : bruit, pollution, saturation de la voirie… Entre 5 et 10% de la circulation urbaine serait engendrée par les voitures en recherche de place. Au final, c’est l’ensemble des citadins – conducteurs ou non – qui sont impactés par le manque de places.
A l’inverse, une offre abondante de stationnement peut conforter les utilisateurs dans leur choix d’utiliser la voiture. S’il peuvent se garer facilement ou gratuitement, ils ont davantage tendance à privilégier le confort de leur habitacle. Alors comment trouver le juste équilibre ? Comment repenser le stationnement en ville afin de réduire les embouteillages sans pour autant inciter les automobilistes à utiliser leur voiture ?
3 pistes pour améliorer le stationnement en ville
- des parking-relais pour rendre les villes accessibles aux habitants des périphéries
Généralement situés aux périphéries des grandes agglomérations, les parkings-relais ont une mission : inciter les automobilistes à laisser leur véhicule personnel aux abords des villes, qu’ils effectuent les trajets quotidiennement ou occasionnellement. En effet, la voiture qui offre de nombreux avantages en terme de confort et permet de se déplacer sur l’ensemble du territoire peut vite se transformer en cauchemar lorsqu’il s’agit de se déplacer en centre-ville. A proximité immédiate des transports en commun, les parking-relais reposent sur l’intermodalité des transports, c’est-à-dire sur le fait d’utiliser plusieurs modes de transport au cours d’un seul trajet. Ces systèmes peuvent également être combinés à un service de vélo partagé.
Pour favoriser son adoption, ce dispositif est souvent incitatif : grâce à un tarif préférentiel, il permet de se garer facilement et à moindres frais et de prendre les transports en commun. A Strasbourg, il est possible de stationner un véhicule une journée et d’obtenir un titre de transport aller et retour pour 4,10 euros. A Marseille, le tarif peut aller jusqu’à la gratuité lorsque l’usage du parking est combiné avec le réseau de transport en commun de la ville. Ces aménagements offrent donc de nombreux avantages : ils permettent de réduire efficacement la circulation en ville et de faire des économies pour ses utilisateurs. Ils représentent aussi une solution de mobilité durable.
- des applications pour trouver sa place de stationnement plus rapidement
Et s’il était possible de s’épargner le fléau que représente la recherche d’une place de stationnement en surface ? Grâce à certaines applications mobiles, il est possible de se garer beaucoup plus facilement et donc de limiter la congestion des centres-villes.
Lancée en 2015 par le leader mondial des horodateurs Parkeon, l’appli Path to Park recueille les données de stationnement pour prédire, grâce à un algorithme et à l’analyse de ces données, les zones de stationnement dans lesquelles l’utilisateur a le plus de chances de trouver une place. Pour cela, elle prend en compte la durée moyenne de stationnement mais aussi les pics de fréquentation. Selon Yves-Marie Pondaven, CTO de Path To Park, le temps moyen pour trouver un stationnement à Paris serait passé de 15 minutes en moyenne à 6 minutes pour les usagers de l’application, qui est disponible gratuitement pour toutes les grandes villes de France.
Faut-il continuer à chercher une place sur la voie publique ou se résoudre à payer un parking privé ? Pour répondre à cette question, Parking Map a développé une plateforme collaborative qui aide les gestionnaires publics et privés à indiquer en temps réel les places disponibles dans les parkings mais aussi en voirie. Grâce à des capteurs, le logiciel de Smart Parking permet de cartographier en temps réel les places disponibles et de les agréger. Si aucune place n’est disponible en voirie, l’automobiliste est automatiquement dirigé vers un parking privé. Lancée en 2013 à Orléans, Soissons et Saint-Germain-en-Laye, la solution comptabilise d’ores et déjà plusieurs milliers d’utilisateurs.
- les systèmes de véhicules partagés avec des places dédiées
Et si la solution, pour limiter le temps perdu à chercher une place était d’abord de réduire la circulation automobile ? Pour soutenir le partage des véhicules et éviter que les voitures individuelles occupent des places toute la journée, certaines villes réservent des places de stationnement à l’auto-partage ou au covoiturage. Pour les municipalités, les bénéfices sont multiples : moins de voitures en circulation mais surtout plus de rotations sur les places disponibles.
Si les premiers systèmes d’autopartage se montraient parfois contraignants car il était nécessaire de réserver une borne pour restituer le véhicule, de nombreux services proposent désormais des locations en free floating. Popularisé par les trottinettes électriques en libre service, le free floating permet de se garer sans contrainte dans des places réservées par la ville. Ce système d’autopartage est largement plébiscité par les collectivités car il ne nécessite pas l’installation d’infrastructures spécifiques. Un modèle vertueux qui a fleuri dans de nombreuses capitales européennes et s’installe progressivement dans les grandes agglomérations françaises.
Il existe plusieurs facteurs permettant d’inciter les automobilistes à adopter des comportements plus respectueux de l’environnement. Si la réduction ou l’augmentation des places de stationnement font partie des outils incontournables à destination des élus, elles doivent s’accompagner de mesures incitatives pour promouvoir les transports en commun et les véhicules partagés. C’est à cette unique condition que le stationnement en ville pourra devenir plus fluide et gagner en efficacité.