Au Pays-Bas, les dessous d’une autoroute transformés en espace de vie et de commerce
À 11 kilomètres au nord-ouest d’Amsterdam, les habitants du village de Koog aan de Zaan ont réussi à transformer les dessous délaissés de l’autoroute qui séparait la commune en deux en un nouveau centre de vie.
Aménagée dans les années 1970, l’autoroute A8, longue d’à peine 10 kilomètres, a la mauvaise idée de traverser le centre du village de Koog aan de Zaan (11 000 habitants), surélevée par des piliers de 7 mètres de haut sur une longueur d’environ quatre cents mètres et une largeur de quarante mètres. Une fracture de béton, sous laquelle seront aménagés un vaste parking à la capacité d’accueil bien supérieure aux besoins du village ainsi qu’un stand de tir. Un passage « sale, venteux et humide », dixit Pieter Bannenberg, l’un des architectes en charge du projet, que les habitants répugnent à emprunter. Il est pourtant incontournable pour rejoindre les commerces du village et l’église au sud ou l’école et la mairie au nord… En 2003, la municipalité décide de lancer une opération pour reconquérir cet espace désavoué afin d’en faire un lieu de qualité et rétablir le lien entre les deux côtés de la commune.
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Une couture urbaine « bottom up »
Si la mairie est à l’initiative du projet, les habitants se le sont rapidement approprié par leur participation à des concertations et à l’élaboration d’un document intitulé A8ernA reprenant leurs propositions. Pieter Bannenberg, l’un des architectes en charge du projet, raconte : « ce projet est en réalité bottom up car l’énergie qui l’a insufflé provient des habitants du village eux-mêmes ».
Et deux individus en particulier. Les deux frères qui tenaient le supermarché du village voulaient développer leur commerce et ont alors vu dans les dessous de l’autoroute l’opportunité de s’agrandir en construisant un magasin plus grand. De même, le poissonnier qui vendait ses produits dans une camionnette sous l’autoroute ainsi que le fleuriste ambulant voulaient investir dans une boutique. Un jeune du village a proposé de créer un espace de street art. De l’autre côté, la boutique de vélo déjà présente sous l’autoroute et l’Église tenaient absolument à conserver des places de parking pour leur public respectif.
Il a alors fallu travailler ensemble avec le soutien de la mairie et du cabinet NL Architect. « La rapidité et l’efficacité étaient de mise puisque nous ne disposions que de deux ans pour réaliser le projet afin de toucher la subvention européenne obtenue par la municipalité. »
De parking lugubre à nouveau centre de vie du village
Et le pari est réussi. La réhabilitation des dessous de l’autoroute en trois espaces distincts a complètement transformé l’atmosphère du lieu et a permis de réconcilier les habitants avec cet espace autrefois désavoué. Mieux, il a reconnecté toute la partie sud de la ville à sa portion nord.
La partie ouest est constituée de plusieurs aires de jeux : un skate-park et un terrain de foot et de basket ont ainsi été installés ainsi qu’une zone de street art. Le nouveau supermarché, la poissonnerie et le fleuriste ont pris place dans la partie centrale. Par un réaménagement et une optimisation de l’espace, 120 places de parking ont pu être sauvegardées afin d’accueillir la clientèle des commerces qui dépasse maintenant les seuls habitants du village pour inclure ceux de l’agglomération de Zaanstad à laquelle appartient Koog aan de Zaan et autres curieux.
L’ancien passage lugubre est aujourd’hui un pôle d’attractivité. Une boucherie et un magasin de liqueur se sont installés dans un vieux bâtiment près de l’autoroute afin de bénéficier du dynamisme du lieu. Enfin, le projet a permis de « reconnecter le village à son histoire ». En effet, la commune est traversée par la rivière Zaan mais ses abords sont toutefois entièrement urbanisés privant les habitants d’un point de vue sur le cours d’eau. Un petit port a été aménagé dans la partie est pour reconnecter le village à son élément naturel et à son histoire.
Koog aan de Zaan, autrefois victime collatérale des grands plans de planification, a su reprendre en main son destin en réhabilitant les dessous de l’autoroute qui traverse son centre. La ville démontre qu’avec un brin d’originalité et de volonté, il est possible de transformer une problématique urbaine en opportunité pour plus de vie participative et d’idées innovantes