Gil Avérous, président de l'association "Ville de France", partage son analyse sur l'attractivité certaine des villes françaises.
Publié le 27.06.24 - Temps de lecture : 3 minutes

G. Avérous : « Renforcer les villes-centres plutôt qu’étendre les intercommunalités »

En pleine mutation, les villes moyennes françaises retrouvent une attractivité certaine, portée par des politiques locales innovantes et un cadre de vie privilégié. Gil Avérous, président de l’association « Ville de France« , partage son analyse sur cette dynamique positive, marquée par l’afflux de nouveaux habitants et la revitalisation des centres-villes.

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À RETENIR

  • Les villes moyennes ont souffert de désindustrialisation et d’étalement urbain, mais connaissent un regain d’intérêt avec l’installation de nouvelles familles, notamment depuis l’initiative Action Cœur de Ville en 2018.
  • Il y a une augmentation notable de nouveaux arrivants, principalement des classes moyennes qualifiées, répondant aux besoins des entreprises locales et augmentant les effectifs scolaires.
  • Des villes comme Belfort, Vichy et Dole réussissent grâce à des politiques de gestion des loyers commerciaux, à des programmes de renouvellement urbain et à des investissements dans le logement, l’espace public et les commerces.
  • Le coût de la vie plus bas et la gratuité des transports dans plusieurs villes moyennes, combinés aux services de mobilités douces, améliorent l’attractivité de ces villes pour les populations des grandes métropoles.


On a beaucoup parlé des villes moyennes et de leur attrait pendant et après le COVID. Avec un peu de recul désormais, comment ont-elles évolué au cours des dix dernières années ? Y a-t-il des enseignements communs malgré leur grande diversité ?

Gil Avérous : C’est vrai, il y a une diversité des villes moyennes, mais elles ont une particularité commune : elles ont souffert ces 40 dernières années, notamment de désindustrialisation et d’étalement urbain, ce qui a vidé leurs centres-villes au profit de la périphérie. Elles ont aussi été touchées par la réforme de la carte militaire, avec de nombreux régiments qui ont quitté ces villes. Cependant, depuis quelque temps, et même avant le COVID, ces villes connaissent un regain d’intérêt. Les familles viennent s’y installer, souvent à la naissance d’un enfant ou du deuxième. Aujourd’hui, les gens choisissent leur lieu de vie avant leur travail, ce qui représente une inversion des priorités par rapport à ce que l’on connaissait auparavant. Nous le mesurons grâce aux chiffres de l’INSEE, qui montrent une augmentation de la population plus fort que dans les grandes métropoles. Certaines villes ont bénéficié du dispositif Action Cœur de Ville, initié en 2018, permettant de transformer les centres-villes et d’accueillir de nouveaux habitants avec une offre immobilière plus adaptée. Le développement de l’enseignement supérieur est également un signe positif, qui se développe dans nos villes et aide à retenir les jeunes sur place.

Y a-t-il véritablement une vague de nouveaux arrivants, en quête de proximité, de qualité de vie ? Un “effet télétravail” ?

Gil Avérous : Oui, on observe une augmentation notable des nouveaux arrivants, même si cela ne change pas significativement la physionomie des territoires. À l’échelle d’un bassin de vie, cela peut représenter 100 foyers supplémentaires par an, souvent des classes moyennes avec des qualifications supérieures. Cela répond aux attentes de nos entreprises, qui veulent attirer des cadres, et endigue le déclin démographique de nos écoles. Un signe qui ne trompe pas : l’augmentation des effectifs scolaire et particulièrement des écoles élémentaires – et non maternelles – car les familles arrivent avec des enfants plus grands.

Le pouvoir d’achat est toujours un atout pour les villes moyennes. Le coût de la vie y est plus bas que dans les métropoles 

Quelles sont les exemples de villes qui parviennent à faire correspondre attractivité et aménagement du territoire ?

Gil Avérous : Parmi les indicateurs de succès, la vacance commerciale est cruciale. Des villes comme Belfort ont mis en place une politique d’acquisition des cellules commerciales pour maîtriser les loyers et choisir les locataires. Vichy, une ville thermale, connaît un renouveau avec un important programme de renouvellement du centre-ville grâce à Action Cœur de Ville. L’intervention d’Action Logement a également permis la réhabilitation de bâtiments abandonnés. À Dole, près de 200 logements sont en cours de développement en centre-ville. D’autres exemples incluent Angoulême, Vitré, Chambéry, Niort et Laval, qui investissent dans le logement, l’espace public et les commerces, trois leviers essentiels.


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Dans votre ville, que mettez-vous en place pour répondre aux nouveaux usages, nouvelles aspirations des Français, qu’il s’agisse de mobilité ou de pouvoir d’achat par exemple ?

Gil Avérous : Le pouvoir d’achat est toujours un atout pour les villes moyennes. Le coût de la vie y est plus bas que dans les métropoles, notamment en termes de transport. De nombreuses villes moyennes ont mis en place la gratuité des transports, comme Calais, Châteauroux, Niort et Dunkerque. Accueillir des populations issues de grandes métropoles pousse à développer les mobilités douces auxquelles elles ont été habituées. Je pense à des services de location de vélos ou de trottinettes, comme à Bourges ou Blois, qui favorisent du même coup l’insertion professionnelle en réduisant le besoin de posséder une voiture.

On parle aussi du besoin de penser à l’échelle des bassins de vie, pour mieux coller aux modes de vie. Pensez-vous qu’il faille changer le mode de gouvernance des territoires ?

Gil Avérous : Nous pensons qu’il faut laisser les élus locaux choisir en les laissant appliquer localement les grandes orientations nationales fixées par l’État. La réflexion à l’échelle d’un bassin de vie existe déjà à travers les SCOT et à l’échelle régionale avec le SRADDET. Plus la gouvernance est éloignée, moins les acteurs locaux se sentent impliqués et écoutés. Il est crucial de renforcer les villes-centres et de densifier vers le centre plutôt que d’étendre les intercommunalités de manière excessive.

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