Euroméditerranée : vue de la Bonne mère à Marseille
Publié le 17.04.25 - Temps de lecture : 3 minutes

« Euroméditerranée : créer une ville productive, où cohabitent logements, bureaux et activités productives »

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À RETENIR  

  • Euroméditerranée a transformé profondément la façade portuaire de Marseille en reconvertissant des friches industrielles, créant 756 000 m² de bureaux, 10 000 logements, et en faisant émerger le troisième pôle tertiaire de France. 
  • La phase Euroméditerranée 2 (jusqu’en 2040) prévoit 10 000 logements supplémentaires, 350 000 m² d’activités et un parc de 16 hectares jouant un rôle écologique majeur contre les inondations et la chaleur. 
  • L’intégration écologique repose sur un laboratoire d’innovation urbaine testant sols perméables, végétation adaptée, ventilation naturelle et thalassothermie, tout en garantissant un confort abordable. 
  • Le projet combine réhabilitation de bâtiments industriels, mixité sociale avec 30 % de logements sociaux ou intermédiaires, et développement de mobilités douces pour créer une ville inclusive et productive. 

À la tête de l’Établissement Public d’Aménagement Euroméditerranée, Aurélie Cousi revient sur trois décennies de transformation urbaine à Marseille. Logement, économie, climat, mobilité : le plus grand projet de rénovation urbaine d’Europe du Sud s’impose comme un laboratoire à ciel ouvert de la ville durable et inclusive. Alors que s’ouvre une nouvelle phase jusqu’en 2040, sa Directrice générale détaille les priorités à venir. 

Trente ans après son lancement, quel regard portez-vous sur le projet Euroméditerranée ? 

Aurélie Cousi : Ce qui saute aux yeux, c’est la transformation urbaine majeure de la façade arrière-portuaire de Marseille. Nous avons reculé une autoroute de plusieurs centaines de mètres, enfoui une autre le long du port, ce qui a permis de reconquérir des espaces auparavant en déshérence. Ces lieux ont été rendus à la ville, et cela change en profondeur l’image de Marseille. C’est l’une des grandes réussites de ces trente dernières années. Mais au-delà de l’aménagement, l’objectif initial était aussi économique. En 1995, Marseille était en crise : perte d’emplois, déclin démographique, tissu industriel sinistré. Euroméditerranée a été conçu comme un levier de redynamisation du centre-ville pour en faire le moteur du développement économique de la métropole. Aujourd’hui, ce pari est tenu : 756 000 m² de bureaux ont été construits, accueillant notamment des entreprises des secteurs logistique, banques, assurances, immobilier et numérique. Nous sommes désormais le troisième pôle tertiaire français, derrière Paris La Défense et Lyon Part Dieu. Ce développement s’incarne dans des marqueurs urbains forts, comme les tours CMA CGM ou La Marseillaise. Enfin, dès le début, nous avons défendu une vision de « ville complète » : environ 10 000 logements créés, plus de 5 000 rénovés, sur d’anciens sites industriels mais aussi dans le tissu urbain existant. Marseille Capitale Européenne de la Culture en 2013 a été un accélérateur, avec la création de l’esplanade Gisèle Halimi, l’ouverture du Mucem, et un rattachement renforcé de ces nouveaux quartiers au Vieux-Port et au Panier. 

Quelles sont les retombées concrètes pour les Marseillais ? 

Aurélie Cousi : Les grands équipements réalisés — hôpital européen, le FRAC, les espaces publics — améliorent clairement le quotidien. Mais les habitants s’expriment surtout sur les chantiers à venir, notamment via les réseaux sociaux. Il y a un vrai attachement à la qualité urbaine produite, mais aussi des attentes fortes sur l’animation des rez-de-chaussée et la vitalité commerciale. Ces quartiers naissent avec le temps. Il faut créer des lieux de rencontre entre les usagers : habitants, salariés, visiteurs. Nous portons une attention croissante à l’accompagnement de cette vie locale.  

Le nouveau parc est au cœur de notre ambition en matière d’adaptation au changement climatique » 

Avec le protocole signé jusqu’en 2040, quelles sont vos nouvelles priorités ? 

Aurélie Cousi : Ce protocole permet d’achever Euroméditerranée 2, qui couvre 170 hectares supplémentaires. Nous allons y produire 10 000 logements et 350 000 m² de bureaux et d’activités, autour d’un projet central : un parc de 16 hectares. Ce parc jouera plusieurs rôles : il offrira un espace de loisirs majeur pour le nord de Marseille, mais il servira aussi de bassin d’expansion des crues, avec la restauration d’un ruisseau et une gestion innovante de l’eau. C’est le cœur de notre ambition en matière d’adaptation au changement climatique. 


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Justement, comment intégrez-vous les enjeux écologiques dans vos aménagements ? 

Aurélie Cousi : La résilience climatique est désormais au cœur de notre démarche. Nous avons créé un Laboratoire Collectif d’Innovation Urbaine pour tester de nouvelles solutions : sols poreux pour infiltrer les pluies méditerranéennes, végétation adaptée au climat, formes urbaines favorisant la ventilation naturelle. Nos bâtiments intègrent des brise-soleils, 80 % des logements sont traversants, et nous développons la thalassothermie — un système qui utilise l’eau de mer pour chauffer ou rafraîchir les bâtiments. Tout cela vise à améliorer le confort sans alourdir les charges pour les habitants. 

Comment répondez-vous à la crise du logement, et notamment au besoin de logements abordables ? 

Aurélie Cousi : Nous construisons environ 400 à 500 logements par an. Bien que notre secteur représente 3 % de la surface urbaine de Marseille, il concentre 10 % de la production totale de logements et 30 % de la production de logements sociaux sur les dix dernières années.

Nous sommes limités à 25 % de logements sociaux dans nos programmes, car nous intervenons déjà dans des quartiers qui en comptent plus de 45 %. Nous misons donc sur la diversité : environ 25 % de logements intermédiaires, et 45 à 50 % de logements libres. Cela permet de loger une population mixte, avec notamment des propriétaires occupants issus du nord de Marseille et de la Métropole, souvent éligibles à la TVA réduite à 5,5 %. 

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