Comment rendre le péri-urbain (encore) plus attractif ?
Et si la périphérie des villes était la clé d’une croissance urbaine plus durable et plus équilibrée ? Entre ville et ruralité, des secteurs longtemps décriés acquièrent de la centralité, retrouvent urbanité et attractivité et deviennent agréables à habiter.
La périphérie manque de centralité ! La formule semble évidente ? L’enjeu est pourtant bien réel. Car le périurbain reste attractif : comme le souligne le géographe Martin Vanier, la crise sanitaire n’a fait qu’accélérer un mouvement bien engagé. « Habiter plus loin » n’a jamais été plus d’actualité.
C’est un même mouvement séculaire qui a étendu la ville au-dehors des anciennes enceintes fortifiées. Quand les faubourgs sont devenus résidentiels, les manufactures et les parcelles maraîchères ont pris le large. Par définition, les extensions urbaines sont vouées à devenir plus agréables à vivre.Sauf que les choses se sont compliquées à la fin du 20e siècle. Sous l’effet de l’exode rural et de l’accroissement accéléré des métiers tertiaires, les zones pavillonnaires ont grignoté des bouts de campagne, disputant l’espace aux zones commerciales et économiques. Si la périphérie a grossi si vite, c’est bien parce que la ville attire. Et nous pousse aujourd’hui à nous éloigner d’elle, mais sans jamais la quitter des yeux.
La « centralité » avenir du péri-urbain
Que manque-t-il à la périphérie pour se structurer et devenir plus désirable ? À l’heure des prix élevés des métropoles et de la progression du recours au télétravail, la question n’est pas complètement résolue. Entre grands ensembles, centres administratifs et galeries marchandes, l’expérience des villes nouvelles a montré combien il est difficile de créer de l’urbanité. Rompant avec le rêve d’une installation au plus près de la ville, les urbains candidats au départ font le choix d’un ancrage « péri-rural », plus près de la nature et d’un foncier abordable. Une tendance qui, selon le géographe Martin Vanier, n’est pas près de s’arrêter.
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Par exemple, à Saint-Hilaire-de-Brethmas, près d’Alès, le péri-urbain n’est pas voué à être le réceptacle d’un exil subi. Dynamisme associatif, construction d’un pôle de santé et d’un éco-quartier… ici, on construit un nouveau modèle entre ville et campagne. Le maire Jean-Michel Perret part d’un constat simple : « le centre des métropoles n’offre plus de foncier et les communes rurales sont contraintes par le zéro artificialisation nette (ZAN). C’est donc le péri-urbain qu’il faut densifier. Nous le faisons raisonnablement, en apportant tous les services qui permettent de bien vivre sur place. » Une approche inscrite dans le réseau Petites villes de demain, dont la transition écologique est l’aiguillon. Car ce sont bien l’environnement et la biodiversité qui motivent les nouveaux habitants et donnent une identité propre à la centralité. C’est tout l’esprit de l’écoquartier de Saint-Hilaire-de-Brethmas, bâti en terre crue et bois des Cévennes. « Nous proposons un démonstrateur de la ville durable à partir des ressources locales. La Camargue toute proche fournit la paille de riz qui compose l’isolation thermique des bâtiments. » Au programme, 40 logements à taille humaine et des locaux d’activité ouverts aux artisans et petites entreprises.
Mieux intégrer la périphérie au tissu urbain
Avec l’affirmation de cette « péri-ruralisation », le divorce entre la ville et la périphérie est-il consommé ? Aussi paradoxal que cela puisse paraître, on ne restructure pas la périphérie contre la ville, mais en inventant de nouvelles relations avec elle. En décongestionnant la ville-centre, on offre des services à ceux qui habitent à la frontière. Structurer la périphérie par des services et lieux publics rassembleurs est bien sûr un prérequis. Le dynamisme associatif est une condition tout aussi incontournable si l’on veut donner sa pleine identité au lieu que l’on habite.
Encore faut-il que les périphéries se coordonnent entre elles, y compris sur le plan budgétaire : c’est dans cette logique que Saint-Hilaire-de-Brethmas laissera la nouvelle piscine se construire dans une commune voisine pour de son côté accueillir le pôle culturel communautaire.
Et l’emploi dans tout ça ? Près de Toulouse, la ZAC du Rivel se développera autour des technologies de l’environnement, en cohérence avec les activités de pointe de la métropole. Pour se rendre au travail, le vélo ou une petite marche remplaceront les longs trajets pendulaires. Cet exemple montre à lui seul que les collectivités peuvent davantage miser sur la spécialisation et l’interaction entre les territoires.
La mobilité, clef des nouvelles périphéries
Cette répartition équilibrée des fonctions nécessite d’organiser la mobilité à plusieurs niveaux : vers la métropole, entre les périphéries et au sein du nouveau centre. C’est ce que font les syndicats mixtes de transport comme Tisséo et SMMAG autour de Toulouse et Grenoble. Les politiques public/privé de covoiturage et de rabattement en parking relais (P+R) se développent elles aussi. Les ZFE, quant à elles, méritent une déclinaison locale : pas moins de 40 % des émissions de gaz à effet de serre trouvent leur source en dehors des grandes métropoles. Pour inverser le mouvement, Saint-Hilaire-de-Brethmas multiplie les voies cyclables vers les zones d’activité de la commune, mais aussi Alès et les communes voisines. La ville du quart d’heure théorisée par l’urbaniste Carlos Moreno n’est pas réservée aux seules villes-centres !