Biomimétisme : de la nature à l’organisation de nos villes
Le biomimétisme est un courant en pleine expansion depuis le début des années 2000, il s’inspire de la nature pour créer de nouveaux outils allant de l’architecture à la micro-ingénierie, son influence se fait ressentir dans toutes les sphères créatives. Dans le domaine de l’architecture, afin de réconcilier les enjeux écologiques avec nos modes de consommation et de production, le biomimétisme suppose une nouvelle organisation de nos villes, plus respectueuses de l’environnement.
Qu’est-ce que le biomimétisme ?
Si nous apprenons en imitant nos maîtres, il n’est pas étonnant de constater que toutes les plus grandes découvertes techniques et artistiques ont commencé par l’étude et l’imitation de la nature. À mesure que les outils technologiques se complexifient, l’écart entre l’humain et son environnement se creuse, de manière à ce que Janine Benyus en face un courant disciplinaire à part en 1997 dans son ouvrage Biomimicry : Innovation Inspired by Nature. Aujourd’hui, le biomimétisme s’installe dans toutes les sphères créatives, jusqu’à ce que la nature devienne la mesure de nos villes, et y compris dans l’architecture, le mentor de nos recherches et le modèle de nos solutions bio-inspirées. Si la nature apparaît comme un modèle d’organisation c’est grâce à la résilience écologique, c’est-à-dire la capacité d’un écosystème à retrouver un fonctionnement et un développement normal après une importante perturbation. Autrement dit, la nature s’adapte toujours aux conditions environnantes.
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Le biomimétisme dans l’architecture
Le biomimétisme est, depuis 2015, un courant de recherche reconnu par l’État grâce à l’ouverture du Centre Européen d’Excellence en Biomimétisme à Senlis (CEEBIOS). Dans cette vaste discipline que l’on nomme le biomimétisme, il existe toutefois différents embranchements : une approche bionique, biomorphique et enfin biomimétique. De ces différentes approches naissent différents courants architecturaux, chacun avec ses spécificités propres, mais qui proviennent toujours d’une étude approfondie des processus naturels.
L’architecture biomorphique
Comme son nom l’indique, l’architecture biomorphique met l’accent sur la morphologie, donc la structure organique du vivant, mais aussi sur les matériaux de synthèses qui s’en rapprochent le plus. La construction et les lignes de force de l’architecture biomorphique s’inspirent de la structure interne des organismes vivants. L’ambition est que le bâtiment s’insère parfaitement dans son écosystème, privilégiant la continuité entre les outils humains et la nature plutôt qu’une rupture franche. Grâce à la recherche sur les matériaux naturels, le biomorphisme favorise le développement durable et l’innovation écologique.
L’architecture bionique
L’architecture bionique est un courant du design et une expression constructive architecturale dont la composition et les lignes de force empruntent aux formes naturelles, c’est-à-dire biologiques. Ce style avant-gardiste refuse les angles droits du classicisme. La forme, l’esthétique, est étudiée pour optimiser le recours à la lumière naturelle, pour réguler efficacement la température sans faire intervenir d’outils technologiques, en bref de garantir, dès la conception, le développement durable de l’immeuble.
L’architecture biomimétique
L’architecture biomimétique s’éloigne pour sa part de la forme du vivant pour privilégier l’étude interne des organismes, leur composition et leur résilience en particulier. L’accent est mis ici sur l’organisation du bâtiment, la manière dont les matériaux se répondent entre eux pour créer une véritable harmonie. Plus qu’un bâtiment, l’architecture biomimétique s’intéresse aux quartiers, à une plus grande échelle pour maximiser ses effets positifs sur la nature. La gestion de l’eau et de l’électricité notamment est un enjeu majeur de l’architecture biomimétique pour limiter l’impact sur l’environnement. Le développement durable d’un quartier entier est en ce sens une prérogative de taille.
La nature comme défi technologique
Ces dernières années, les différents projets durables bio-inspirés s’enchaînent et ne se ressemblent pas ! Au contraire, l’innovation technologique tire parti de la richesse infini de notre écosystème. Par exemple, des chercheurs australiens ont développé une approche par photosynthèse, grâce à l’étude d’une variété de fougère, pour augmenter de 3000% la capacité de stockage en énergie solaire d’un nouveau type d’électrode. Les possibilités sont illimitées, tant la nature regorge de miracles. Autre exemple, la conduite synchronisée des véhicules autonomes pour éviter les collisions pourrait être améliorée grâce à l’étude du comportement des bancs de poissons et des vols d’étourneaux. La détection et la communication inter-véhicules pourrait ainsi apprendre de l’évolution naturelle pour décongestionner et sécuriser le trafic routier de demain.
La ville elle-même peut être organisée sur le modèle du vivant en privilégiant l’harmonie entre les bâtiments et leurs environnements. Réintroduire la nature en zone urbaine pourrait également servir à tempérer le climat, véritable enjeu face à l’imperméabilisation des sols en territoire urbain. « Plutôt que de construire des bâtiments énergivores qui produise beaucoup de CO2, il faut construire des bâtiments biomimétiques, c’est-à-dire isolés à l’intérieur et à l’extérieur et ventilés naturellement », explique Vincent Callebaut. Selon lui, l’architecture biomimétique permettrait de réduire la consommation énergétique d’un bâtiment de 70% par rapport à un immeuble classique. Loin d’être les maîtres et possesseurs de la nature, peut-être devons-nous nous efforcer d’être ses élèves ?