Pourquoi les séniors ont un rôle clé dans la ville de demain
Si la question de la place des séniors dans la ville est d’ores-et-déjà centrale, et notamment celle du lieu de vie, elle le sera d’autant plus dans les années qui viennent. Les villes doivent anticiper ce tournant et intégrer sur leurs territoires des lieux de vie qui seront, aussi, lieux de vie sociale. Entretien avec Mélissa Petit, sociologue, Mixing Générations.
Quelles problématiques spécifiques rencontrent les « jeunes séniors » qui représenteront 1/3 des Français en 2050 ?
Ils en rencontrent plusieurs. Comment continuer à contribuer à la société lors du passage à la retraite ? Comment créer des projets et s’organiser à la retraite ? Comment continuer à créer des liens avec les autres ? Comment trouver sa place au sein de la famille et parfois aider et accompagner les autres générations ? Comment repenser son lieu de vie ? etc.
La création de liens sociaux et la participation sociale sont notamment centrales…
Dans une étude sur les modes de vie des jeunes retraités, j’avais analysé que plus la transition travail – retraite était progressive, mieux les retraités vivaient cette tranche de vie. Le fait de participer à la vie sociale est un élément crucial dans la construction de l’identité de chacun, et même à la retraite. C’est ainsi, que nous observons qu’il y a 39 % des 55 ans et plus qui sont bénévoles (selon une étude de la Fonda, 2017)[1] et nous pouvons aussi noter l’importance des retraités dans les instances communales. Il y a un besoin de trouver des solutions permettant la participation sociale des retraités. De plus, selon une étude des Petits Frères des Pauvres de 2019, 3,2 millions de personnes de plus de 60 ans sont en risque d’isolement relationnel. Il y a une crise du lien social, dans une société individualiste, et qui prône de façon majoritaire la performance et l’urgence.
Quels sont les principaux acteurs pour tenter de répondre à ces manquements ? Peut-on parler du rôle à venir des acteurs publics ?
Les actions locales peuvent avoir un impact plus que positif sur le quotidien des retraités. Les collectivités peuvent par exemple favoriser le sentiment d’utilité des séniors en liant à la fois les compétences des retraités de leur commune et les besoins du territoire. Ainsi, un retraité, qui peut avoir des compétences en botanique et en jardinage, pourra aider l’école primaire qui vient tout juste d’installer un potager dans sa cour.
Et concernant les mobilités ?
Il y a une vraie nécessité de faciliter la mobilité douce (marche, vélo, bus) hors du domicile des personnes afin qu’elles puissent se déplacer au mieux, et revaloriser les commerces de proximité, véritable acteur du lien social.
Que peut-on attendre des acteurs privés ?
Les acteurs privés ont aussi leur rôle à jouer. Des startups développent des mises en lien entre des entreprises et des retraités qui désirent retravailler et revaloriser leurs compétences de façon ponctuelle. Des associations luttent contre l’isolement et imaginent des activités pour réunir les individus isolés ou non. Des grands groupes s’investissent sur ces questions et plus largement dans la société de la longévité.
Vous citez les tiers-lieux, les conciergeries, les espaces territoriaux d’entraide, comment le territoire peut-il repenser l’urbanisme pour favoriser le lien social des séniors ? Cela passe-t-il par la mixité générationnelle dans le logement par exemple ?
La manière dont on aménage l’espace dans les communes est importante pour favoriser le lien social, mais aussi les déplacements des séniors. Si vous installez des assises (comme des bancs), mais aussi des toilettes à côté du marché, vous aurez plus de personnes qui se déplaceront, et vous créerez des moyens de perdurer le lien social. Je propose également la possibilité de créer des espaces territoriaux d’entraide, des tiers-lieux ou de mutualiser des espaces communs. L’idée est d’être en mesure de se croiser, à la fois pour participer à des activités, pour contribuer à la vie sociale et pour s’entraider.
Que peut apporter le mixage des générations ?
Toutes ces initiatives fonctionnent si les actions ne sont pas uniquement créées pour les séniors, favorisant l’entre-soi. Au contraire, il y a un besoin de tendre vers le multigénérationnel, de créer des actions et des logements composés de plusieurs générations. Dans un second temps, la manière de créer du lien entre chaque génération se pose. Et là, on peut avoir besoin d’un médiateur, de créer des lieux de rencontres, ou de participer à des activités, où l’on pourra tous se croiser.
Dans cet esprit, de nouvelles formes de logements pour séniors arrivent, comme les résidences multigénérationnelles. Demain pourraient-elles devenir des lieux où l’utilité des seniors pourrait s’exprimer ?
Tout à fait, les résidences multigénérationnelles peuvent permettre à la fois d’être un lieu où les séniors peuvent exercer leur utilité sociale, mais aussi recréer des liens sociaux avec les membres de la résidence dans laquelle ils vivent, et aussi la population qui vit à proximité de la résidence. Il est important que les résidences soient ouvertes sur l’extérieur pour favoriser un maillage territorial.
Une offre de logements séniors nouvelle génération
Face à ces besoins croissants, des acteurs du logement et de l’aide sociale s’allient pour proposer des solutions d’habitat aux séniors autonomes, combinant lien intergénérationnel, et animations adaptées (projets collaboratifs, ateliers). Des logements meublés, adaptés à leurs revenus, faisant cohabiter dans des espaces partagés des retraités mais aussi des actifs, permettant de créer un espace pour lien et l’entraide sociale. Ainsi, Nexity a conçu COMPLICITY®, un habitat multigénérationnel doté d’un projet de vie sociale résidentielle, et a conclu des partenariats avec l’ADMR et avec le Groupe SOS Séniors pour leur en confier l’animation.