Inondations : quelles solutions pour limiter les risques ?
Le 23 octobre, six départements du sud de la France ont été placés en vigilance orange, balayés par de puissants orages et des inondations. Particulièrement soumis aux risques naturels, certains départements doivent davantage se préoccuper de la gestion des eaux pluviales afin de se prémunir des risques d’inondations, quelles sont les solutions ?
Alors que les inondations sont le risque naturel numéro 1 en France, les outils dédiés à la gestion des eaux pluviales ne sont pas forcément adapté aux réalités de l’urbanisme que sont l’urbanisation intensive et l’artificialisation des sols qui en résulte. La situation a poussé les pouvoirs publics à poser les bases d’une nouvelle politique de gestion des eaux pluviales, sous l’impulsion d’un rapport du CGEDD en 2017, politique renforcée par le dévoilement récent du plan du gouvernement dans le cadre de la lutte contre l’artificialisation des sols, rendu public en juillet 2018.
L’inondation : principal risque naturel en France
Le risque d’inondation ne semble jamais avoir été aussi prégnant. Plusieurs catastrophes récentes ne font d’ailleurs que renforcer ce sentiment, à l’image des inondations dans l’Aude en octobre 2018, de la crue de la Seine en juin 2016 ou encore des débordements dans les Alpes-Maritimes en octobre 2015.
S’il est difficile d’affirmer que ces épisodes sont plus nombreux ou intenses que par le passé, un élément ne fait toutefois aucun doute : l’inondation est le premier risque naturel en France. À en croire le CEPRI (Centre européen de prévention des risques d’inondation), 70% des communes de l’Hexagone présentent un risque d’inondation. Au total, ce sont mêmes 17 millions de personnes qui pourraient être touchées par des débordements. En cause ? Un maillage important de cours d’eau sur tout le territoire et une urbanisation qui n’a que très peu tenu compte des zones inondables.
Le risque d’inondation, un coût colossal pour les collectivités
Alors que la crue de 2016 est loin d’avoir été l’épisode le plus violent de l’histoire, elle a pourtant causé plus d’un milliard d’euros de dégâts. L’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) indique d’ailleurs que si la France était confrontée à une inondation telle que celle de 1910, le coût en dommages directs serait compris entre 3 et 30 milliards d’euros.
Un cadre législatif et matériel inadapté aux risques actuels
Non seulement le risque est réel, mais tout laisse à penser qu’il va s’accentuer dans les années à venir. Selon une étude publiée par la revue Climate, le nombre de personnes concernées par des inondations en Europe pourrait augmenter de 86% à 123% en raison notamment du réchauffement climatique. Malgré ce contexte accablant, les outils législatifs et matériels dont disposent la France pour lutter contre les débordements ne semblent pour le moment pas à la hauteur.
– Un appareil réglementaire trop complexe : non seulement il existe de très nombreux textes abordant la question de la gestion de l’eau pluviale (code de l’urbanisme, Loi sur l’eau, code de l’environnement) – rendant difficile une application uniforme -, mais ce cadre législatif ne donne aucune obligation chiffrée de collecte ou de traitement des eaux de pluie aux collectivités. Tout repose ainsi en quelque sorte sur leur bon vouloir et leur connaissance du sujet.
– Des infrastructures inadaptées : bassin de retenue, puits perdu, tout au réseau… les installations pour limiter les inondations sont les mêmes que celles utilisées il y a déjà parfois plusieurs siècles. Avec l’urbanisation et l’imperméabilisation des sols notamment, ces infrastructures ne sont plus adaptées au risque actuel et affichent désormais leur limite.
Un plan d’urgence pour actualiser la gestion des eaux pluviales
Pour palier aux insuffisances actuelles, le gouvernement a décidé de réagir en commandant au CGEDD (Conseil général de l’environnement et du développement durable) des recommandations pour améliorer la gestion des eaux pluviales. Rendu en avril 2017, ce rapport propose un plan d’actions « d’urgence » sur 10 ans afin de limiter le risque d’inondation par ruissellement et par débordement, mais également pour la préservation de la biodiversité et la protection de la qualité de l’eau.
– Recentrer la gestion sur les eaux pluviales : alors que l’organisation actuelle s’intéresse davantage aux eaux usées, le rapport du CGEDD préconise de concentrer les efforts sur les eaux de pluie car une part importante de la pollution est rejetée en amont des stations d’épuration. Cela suppose de renforcer les outils de mesure afin de réduire les déversements à la source.
– Assurer une gestion plus intégrée : la mission défend une gestion des eaux pluviales qui ne se base plus uniquement sur les risques, mais également sur la gestion quasi quotidienne. L’enjeu est de dépasser la législation jugée trop compliquée, notamment en désignant un organisme unique en charge de piloter l’ensemble de la problématique.
– Avoir des programmes d’investissement réalistes : alors que l’objectif de non-conformité zéro est qualifié d’irréaliste, le rapport préconise que les financements se concentrent sur des programmes réalistes d’actions pour des échéances de 5 et de 10 ans, dans le but d’assurer la conformité des systèmes d’assainissement et le renouvellement des installations actuelles.
– Renforcer la prévention des risques : la mission recommande également d’inciter les collectivités à mieux prendre conscience du risque d’inondation par ruissellement. Pour cela, des investissements sont nécessaires, tout comme l’élaboration d’un guide pour coordonner les zonages et la politique de prévention au niveau local.
Ralentir l’artificialisation des sols pour limiter les inondations
À la suite des conclusions du CGEDD, les pouvoirs publics ont ouvert un nouveau sujet pour limiter le risque d’inondation : l’artificialisation des sols. Un rapport, s’inscrivant dans le Plan pour la Biodiversité et faisant écho aux recommandations de l’Union européenne, a ainsi été remis en juillet 2019. Son objectif ? Permettre d’atteindre l’objectif de « zéro artificialisation nette des sols » d’ici 2050, principale cause du ruissellement et des débordements. Pour y parvenir, les préconisations s’articulent autour de trois axes :
– l’amélioration de la connaissance sur l’artificialisation afin de déployer une gouvernance dédiée ;
– la modification du cadre réglementaire et fiscal pour dissuader à la poursuite de l’artificialisation des terres ;
– l’obligation que tout projet d’artificialisation soit conditionné à la renaturation d’autres espaces afin de compenser.
Sources :
Les enjeux de la gestion des eaux pluviales – Ministère de la transition écologique et solidaire
Pourquoi la gestion des eaux pluviales doit rapidement être améliorée – La gazette des communes – 2018
Objectif « zéro artificialisation nette » : Éléments de diagnostic – Ministère de la transition écologique et solidaire – 2018
Objectif « Zéro artificialisation nette » – Ordre des architectes – 2019
Les inondations, premier risque naturel en France – Le Point – 2018
Selon une étude, les inondations vont se multiplier en Europe – Le Parisien – 2018